Métiers de la santé : quelle stratégie de RSE ?
17 juin 2016
La Responsabilité Sociétale des Entreprises s’est imposée comme une contrepartie nécessaire et attendue pour faire face aux défis de la nouvelle économie, la France y est d’ailleurs passée reine. Dans les métiers de la santé, cette notion montre même une pertinence redoublée.
Traverser la crise
L’économie-monde a radicalement bouleversé l’ancien capitalisme, et les crises successives obligent les entreprises, surtout occidentales, à imaginer des alternatives aux dérives financières possibles. Dans un tel contexte, la RSE s’est imposée comme un atout à très fort potentiel. Comme l’expliquent Ecovadis et la médiation inter-entreprises, un organisme du ministère des Finances, dans Challenges, après la réalisation d’une étude sur ce thème : « Cet engagement RSE fort se traduit par un réel avantage compétitif de nos entreprises sur le marché international par rapport à ses concurrents dits « à bas coûts » » (1). Cette stratégie, soutenue par le gouvernement, a fait de la France la championne de la RSE. Promouvant une responsabilité élargie des entreprises, tant au niveau de l’apport social qu’en termes de respect de l’environnement, la RSE est une plus-value « morale » qui donne des gages au consommateur, lequel est aussi un citoyen inquiet en temps de crise. De surcroît, elle a des effets bénéfiques autant sur l’entreprise elle-même, par la dynamique qu’elle engendre, que sur le monde qui l’entoure.
Une démarche proactive
La condition pour rendre la RSE vraiment opérative est d’en faire un élément à la fois dynamique et structurel pour l’entreprise et la collectivité. Bruno Colin, en charge des stratégies RH du groupe IENA, l’expose ainsi : « Pour que la RSE soit créatrice de valeur sur le moyen et long terme, elle ne doit pas être considérée comme une contrainte légale supplémentaire, mais bien comme une opportunité de repenser son modèle de croissance économique. L’entreprise doit en faire un des piliers de son développement. Pour cela, elle doit s’orienter vers une démarche proactive et structurée. » (2)
Certaines entreprises, pour s’assurer de tels objectifs, choisissent d’entrer dans un processus de certification. La norme ISO 26000 donne des directives qui permettent de clarifier la notion de responsabilité sociétale et de transformer les intentions en actes concrets. En juin 2015, le groupe de certification AFNOR et le C2DS (comité pour le développement durable en santé), ont donné une conférence de presse au sujet d’un guide conjointement élaboré sur ce sujet. À cette occasion, le directeur général de l’Anap (Agence nationale d’appui à la performance pour les établissements de santé), Christian Anastasy, a pu saluer ce travail comme suit : « Vous avez réussi à montrer que (…) l’application de la norme ISO 26000 [était] un facteur de mobilisation pour les acteurs qui donne du sens à leurs actions quotidiennes et permet d’améliorer les conditions de travail ou de prise en charge des patients. » (3)
La santé comme secteur fer de lance de la RSE
La coopérative d’opticiens Optic 2000 a, par exemple, mis en place plusieurs programmes pour favoriser les lunettiers français confrontés à la concurrence asiatique. Yves Guénin, secrétaire général de l’enseigne, n’hésitait pas à parle dès 2011 de « réalité vécue au quotidien » (4) au sujet de l’ESS. Cette réalité se traduit également aujourd’hui par la mise en place, avec la contribution de divers spécialistes, d’un observatoire des nouveaux risques affectant la santé visuelle et auditive. Mais l’enseigne envisageant son métier comme un « militantisme de la vision », elle s’est surtout engagée depuis des années dans le processus de certification de son réseau auprès de l’AFNOR : « L’évaluation RSE permet d’avoir un vrai retour d’expériences, de faire un état des lieux précis, de mettre en évidence ses atouts, ses faiblesses, des perspectives à court et moyen terme… Elle rassure sur des orientations prises et des choix initiés de longue date. Pour les collaborateurs, elle démontre de façon évidente le bien-fondé de l’engagement sociétal. Un sentiment de fierté et d’appartenance fort à l’entreprise s’en dégage, » explique ainsi le secrétaire général d’Optic 2000 (5).
Le laboratoire pharmaceutique Biocodex donne un autre exemple éloquent de l’importance de la démarche RSE. En 2012, dans un souci de meilleure maitrise de la qualité de production, celui-ci relocalise en 2012 en France ses lignes de productions indiennes, coréennes et brésiliennes. Relocalisation qui a entraîné depuis l’embauche et la formation de 200 nouveaux collaborateurs. Tout cela s’accompagnant, comme l’expose Jean-Marie Lefèvre, PDG de Biocodex, de « programmes d’actions précis afin de réduire l’impact (des) activités sur l’environnement. » (6) Car en rapatriant sa production au plus près des marchés, Biocodex s’est aussi assuré de considérablement réduire son circuit de distribution et d’approvisionnement.
Les laboratoires Sanofi Pasteur ont, de leur côté, reçu le trophée RSE 2015 des entreprises du médicament dans la catégorie coup de cœur du jury, grâce à son programme de remplacement d’un test in vivo chez la souris, par un test in vitro en vue de la commercialisation d’un nouveau vaccin hépatique. « 20 340 souris ne seront plus utilisées d’ici 2018. » (7) Compte tenu des récentes polémiques autour du bien-être animal, l’initiative peut être saluée. Les domaines d’application de cette politique nouvelle sont donc extrêmement divers.
Client-citoyen, client-patient
Si la politique RSE, qui vise le développement durable dans une perspective très générale, affecte ainsi toute sorte de pratiques, elle offre de nouveaux services comme de nouvelles garanties au client-citoyen. Les stratégies RSE possèdent en outre, d’un point de vue symbolique, un effet redoublé quand elle s’exerce dans le secteur de la santé. Dans ce cadre particulier, le client se trouve être surtout un « client-patient », il se trouve dans une « zone » de sensibilité plus élevée qu’ailleurs, et éprouve par conséquent davantage la nécessité d’être sécurisé. De la part d’entreprises qui prétendent prendre soin de notre santé, il existe une certaine logique dans le fait de prêter une attention redoublée à l’environnement ou aux diverses externalités positives qu’elles peuvent apporter à la collectivité. Logique, mais tout de même pas évident pour tout le monde.
(2) http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/rse-et-si-on-transformait-l-essai-462755.html
(5) http://www.rse-innovation.fr/yves-guenin-itw253.html
(7) http://www.leem.org/ceremonie-de-remise-des-trophees-rse-2015-des-entreprises-du-medicament-videos
[…] La coopérative d’opticiens Optic 2000 a, par exemple, mis en place plusieurs programmes pour favoriser les lunettiers français confrontés à la concurrence asiati […]