Burnout : comprendre pour prévenir..
24 septembre 2015
La France était en 2010 le 3ème pays le plus touché au monde par la dépression liée au travail. Encore trop méconnu, le phénomène de burnout effraie et divise. Voici un retour sur l’histoire de ce syndrome médical, ainsi que quelques clés de compréhension pour mieux le comprendre et le prévenir.
Introduction historique du burnout
Le terme de « Burn Out » aussi appelé « Syndrome d’épuisement professionnel », est apparu pour la première fois à la fin des années 60 sous la plume d’Harold B. Bradley, avant d’être repris plus tard par le psychologue américain d’origine allemande Herbert Freudenberger (1927-1999).
En 1974, Freudenberger constate des symptômes tels que la fatigue chronique, l’anxiété, le désinvestissement et même la dévalorisation de soi-même en observant les travailleurs des Free Clinics américaines, des centres de soins pour personnes démunies, notamment les toxicomanes.
Après une année dans ce type de structure, il s’aperçoit que des personnes très capables et motivées sombrent progressivement dans l’agressivité, la perte d’énergie, l’isolement et le cynisme.
Il en déduit que plus une personne sera engagée dans sa tâche, plus elle sera exposée à ce qu’il qualifie de « craquage », d’où le surnom du burnout, souvent appelé « Maladie du battant ». En effet, selon lui, les victimes de burnout sont le plus souvent des personnes perfectionnistes et idéalisant le principe de réussite professionnelle.
Il prétend qu’il existe certaines professions à risques, notamment celles qui supposent des sollicitations mentales, de fortes responsabilités et des objectifs difficiles à atteindre, telles que les infirmières et les avocats par exemple.
Par la suite, le burnout sera considéré comme un état impactant différemment les sujets touchés et pouvant englober diverses formes de troubles. De même, il est abordé par l’observation de plusieurs cas isolés d’avantage que par une expérimentation scientifique stricte. Cependant certains facteurs sont systématiquement présents, notamment l’épuisement physique et mental, la perte de productivité et la baisse de l’implication personnelle.
La recherche empirique sur le burnout débute réellement au début des années 80, notamment par les travaux de la psychologue Christina Maslach. En 1996, elle publie le Maslach Burnout Inventory’s avec sa consœur Susan Jackson pour mesurer l’importance des effets du syndrome et en étudier les causes, à travers l’épuisement, la dépersonnalisation et la chute de l’accomplissement personnel. C’est encore actuellement un ouvrage de référence en la matière. Réédité en 2007, il englobe le phénomène de burnout à toutes les professions, au sens large.
Malgré ces efforts, il n’existe pas encore aujourd’hui de consensus international sur le diagnostic et le traitement du burnout. L’Assemblée Nationale française refuse d’ailleurs de le considérer comme une véritable maladie du travail en juillet 2015, du fait de certaines similitudes avec la dépression.
Il existe cependant des éléments tangibles et des bonnes pratiques pour interpréter et prévenir les risques de burnout.
Les causes du burnout
Un certain nombre de facteurs peuvent favoriser l’apparition du burnout. Ils peuvent être inhérents à la personne ou résulter de son environnement de travail, ou plus fréquemment, des deux à la fois.
Pour ce qui est de la première hypothèse, on pourrait évoquer des attentes trop élevées du travailleur vis-à-vis de lui-même, ainsi qu’une crainte systématique de la défaillance. De même, un manque de détachement par rapport à l’activité professionnelle peut à la longue affecter la vie sociale et personnelle.
Dans son désir de contenter tout le monde et de se montrer « à la hauteur », la personne aura tendance à ignorer ses propres besoins, ainsi que ses frustrations. Enfin, elle pourrait ressentir un sentiment d’ingratitude, un manque de considération par rapport au travail effectué, de la part de son entourage.
Mais le burnout résulte aussi largement de facteurs externes. Les plus évocateurs sont une charge considérable et régulière de travail ainsi qu’une inadéquation entre les objectifs fixés et les moyens mis à disposition pour y parvenir.
On soulignera également le manque de confiance et de cohésion au sein des équipes, ainsi que des incertitudes sur les rôles et responsabilités de chacun. Enfin, une situation précaire de l’entreprise ou encore la crainte de perte de son emploi sont également de nature à favoriser la survenance du burnout.
Les symptômes du burnout
On considère généralement qu’il y a plusieurs phases consécutives pouvant annoncer l’apparition du burnout. Dans un premier temps, la personne touchée sera soumise à un état de stress quasi permanent. Ignorant ces symptômes, elle luttera pour y résister, puis finira par s’y habituer, jusqu’à un état qualifié de « rupture » où un traitement approprié deviendra indispensable.
Enfin arrive l’épuisement professionnel, traduit par un état d’angoisse perpétuelle et une invalidité émotionnelle, qui peut aussi se répercuter sur le cercle social et familial de la personne.
La personne constatera souvent une perte d’efficacité dans son travail, ainsi que des difficultés à se concentrer, elle sera alors tentée d’accroître son temps de travail pour compenser cette baisse et focalisera toute son attention sur son travail. Pourtant le sentiment d’incapacité à remplir convenablement ses tâches persistera.
Dans les symptômes également annonciateurs de burnout, on trouve également des difficultés à trouver le sommeil, qui favoriseront une forte irritabilité ainsi qu’un repli progressif sur soi.
On peut également constater des douleurs physiques récurrentes et des rhumes très persistants. Dans les cas les plus extrêmes peuvent apparaître des consommations excessives d’alcool ou de drogue, ainsi que des comportements à risques.
Enfin, le symptôme souvent cité comme l’aboutissement du processus sera l’adoption d’une attitude cynique, alors même que la personne était initialement très investie et enthousiaste dans son travail. La « dépersonnalisation » du travailleur se traduira souvent par une stricte application du règlement de l’entreprise, ainsi que d’une mise à distance physique, pour limiter toute implication personnelle.
Comment prévenir le burnout ?
S’il n’existe pas de « recette magique » pour éviter l’apparition du burnout, on peut néanmoins minimiser les risques par quelques astuces faciles à mettre en œuvre. Cela passe d’abord évidemment par le fait d’être attentif aux symptômes précédemment cités et d’afficher son soutien aux personnes en difficultés.
Organisation et communication
Ensuite, on peut dans la mesure du possible, remettre en question l’organisation du travail par le dialogue, dans une logique d’améliorations des conditions pour tous. On peut notamment procéder à une réévaluation des objectifs, de manière plus réaliste et valorisante pour les travailleurs. De même, il incombera au supérieur hiérarchique de définir très clairement le rôle et les missions de chacun, afin d’éviter les confusions.
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Apprendre à dire non
Une des clés de cette démarche est d’accepter le fait de dire « non » quand cela s’avère nécessaire.
Contrairement à certaines idées reçues, cela n’est pas dévalorisant et peut même dénoter un certain professionnalisme et une grande force de caractère.
L’équilibre de vie
Au niveau personnel, on limitera l’impact du stress en prenant régulièrement de courtes pauses pendant le travail.
Le maintien d’une bonne santé physique, par des activités sportives et une alimentation équilibrée sera également un atout.
L’objectif majeur sera de délimiter clairement le temps de travail de celui réservé à la famille et aux proches. Un des meilleurs moyens d’y parvenir est de ranger son téléphone et son ordinateur professionnel hors du temps de travail, pour éviter les sollicitations.
Pour conclure, on retiendra que la lutte contre le burnout doit s’organiser non seulement au sein de l’entreprise, mais également à l’extérieur, notamment par la transmission d’informations et l’échange de bonnes pratiques.
Les séminaires d’entreprise et les CHSCT sont de bons relais pour organiser des actions de prévention et instaurer un dialogue constructif, afin d’accroître la connaissance autour du burnout, et le reléguer progressivement au rang de mauvais souvenir.
Dans le cadre de son obligation de prévention des risques (pour remplir le document unique), un employeur doit penser aux risques de surcharge de travail pouvant amener à un burnout, et mettre en place des moyens de prévention (pauses, obligation de déconnexion, etc.)